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Aux sources du canal du Midi

Contrairement à la route tonitruante qui tire au plus droit, escalade les collines et traverse les villes, le canal ne connaît qu'un seul maître : la courbe de niveau. Il la suit docilement, lui et son double obligé : le chemin de halage. Même maintenant où la batellerie à chevaux n'existe plus, on ne peut pas supprimer ces chemins, ne serait-ce que pour la desserte des écluses et l'entretien des berges .

Le canal offre donc au randonneur la douceur de son tracé, l'ombre de ses arbres, le calme de ses berges, les jeux de lumière sur son eau.

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Le canal du midi s'appelait à l'origine : « canal royal de communication des mers océane et méditerranée ».

Vous voyez : il y a Bordeaux à l'ouest, au fond de son estuaire, à presque 100 km de l'océan. Et puis il y a la Garonne qui a été naviguée pendant des siècles par des barques jusqu'à Toulouse, sur 250 km environ et qui est aujourd'hui doublée par un canal latéral. Au XVIIè siècle, il n'y avait ensuite plus aucune communication jusqu'à Sète sur la Méditerranée, à encore 250 km de là.

On n'était pas bien riche dans cette province entre Toulouse et Sète, le temps béni de la culture du pastel était révolu, mais il y avait du blé en abondance et de petites industries dans les villes. Toutes les marchandises allaient à dos de mulet par les chemins des garrigues.

Certes, l'idée d'un canal reliant la Méditerranée et l'Atlantique avait déjà été émise par les Romains. Mais les canaux construits depuis l'Antiquité se contentaient d'envoyer de l'eau d'un point à un autre, à condition qu'il y ait une faible pente régulière, pas d'obstacle ni de forte dénivellation. Ce n'est pas le cas entre Toulouse et Sète. Tous les projets se heurtaient à la présence, en plein milieu du tracé idéal, d'une longue élévation qui, même en son point le plus bas, avoisine les 200 m.

Léonard de Vinci (encore lui !) aurait, parait-il, inventé l'écluse. Mais, si l'écluse est une invention géniale pour faire monter un bateau, elle ne peut en aucun cas faire monter de l'eau ! La seule solution est de détourner et de capter des rivières pour les rassembler au point le plus élevé du tracé du canal de sorte qu'il y ait toujours de l'eau vers chacune des pentes.

Ce sera le trait de génie d'un homme : Pierre-Paul Riquet d'avoir su déterminer exactement le point le plus haut du profil, d'avoir pensé à l'eau de la Montagne Noire, quand même distante de 30 à 40 km, d'avoir réussi à la contraindre, à la canaliser et finalement d'avoir personnellement conduit et financé le plus grand chantier du XVIIè siècle.

La meilleure manière de découvrir les subtilités de cet ouvrage titanesque est, comme toujours, à pied !

 

Tout d'abord, Castelnaudary. Riquet en a fait un vrai port fluvial : un magnifique escalier de quatre écluses fait monter les bateaux venant de la Méditerranée jusqu'à un vaste bassin autour duquel s'ordonne la vieille ville. Nous dormons à l'hôtel de France, un hôtel à l'ambiance un peu désuète, où le menu du soir propose de pantagruéliques assiettes de magret de canard ou de cassoulet.

 

Le lendemain, nous marchons le long du canal, sous une voûte de platanes, jusqu'à l'écluse de La Peyruque. Les écluses de Riquet ont d'élégants bords courbes, pour plus de résistance et pour s'adapter aux dimensions des barques narbonnaises ventrues.

 

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Quelques heures de marche ensuite à travers collines, champs de blé vert, cyprès (certains voient une ressemblance avec la Toscane) et voici Saint-Papoul. L'abbaye possède de remarquables chapiteaux extérieurs attribués au fameux Maître de Cabestany et un joli cloître du XIVè siècle.

 

Plus loin sur le GR 7, Verdun en Lauragais, dédale de ruelles entre les vieilles maisons de pierre.

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Le lac de Saint-Ferréol est perché sur une hauteur. Avec tout le réseau de rivières et de canaux qui lui est relié, il constitue le véritable château d'eau du canal du Midi.

En fait, à l'origine de tout, on trouve les ruisseaux de la Montagne Noire : L'Alzeau et le Lampy. Ils sont captés à plus de 600 m d'altitude et conduits par la Rigole de la Montagne pour renforcer le débit du Sor. Puis, la Rigole de la Plaine reçoit l'eau du Sor à Pont Crouzet, lui adjoint l'eau du Laudot au poste des Thomasses et s'en va approvisionner le canal du Midi en son point le plus haut : le seuil de Naurouze.

C'est sur le cours du Laudot qu'est construit le barrage de Saint-Ferréol. Mais le débit insuffisant et quelque peu capricieux du Laudot rendait, à l'époque de Riquet, aléatoire l'alimentation du bassin de Saint-Ferréol. Aussi, Vauban, après la mort de Riquet et à la demande de ses héritiers, fit prolonger de quelques kilomètres la Rigole de la Montagne pour que cette dernière puisse renforcer également le débit du Laudot. Elle emprunte un tunnel qu'il fallut creuser au-dessous du village des Cammazes. D'où cette belle façade en pierres de taille nommée « voûte de Vauban » qui marque le débouché de la galerie.

 

Dans la plaine, au pied de la Montagne Noire, se trouve la ville de Sorrèze qui doit son développement à sa très ancienne abbaye plusieurs fois détruite et reconstruite. Au XVIIè siècle, les moines bénédictins y fondent un séminaire. Plus tard, Louis XVI y crée une école royale militaire et, au XIXè siècle, Lacordaire, dont la statue trône en bonne place dans la cour royale, en fait un collège de grande renommée.

 

Une fois passé Revel, le GR 653 suit la Rigole de la Plaine dans tous ses zigzags jusqu'au seuil de Naurouze. Mais nous quittons cette belle voie d'eau au niveau du lac de Lenclas pour monter à Saint-Félix-Lauragais, village perché sur une butte qui offre une belle vue sur les pyrénées enneigées. Encore un ancien refuge de Cathares ! La halle est dans le style de ce pays, avec une tour de guet en son centre. Sur la mignonne place du village, le boulanger attend le client en toque blanche, son tablier bien attaché autour du ventre.

L'auberge où nous dînerons ce soir a la réputation d'être une des meilleures tables du département !

 

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Vue sur les Pyrénées enneigées

 

Le lendemain, en longeant la falaise qui domine la Rigole, nous découvrons des espaces vallonnés plantés de blé et parsemés de vestiges de châteaux-forts qui gardent dans leurs pierres la mémoire de toutes les luttes passées : Montmaur, Montferrand...

 

C'est ainsi que l'on arrive au « clou » des réalisations de Riquet, au point de partage des eaux entre la Méditerranée et l'Atlantique : le seuil de Naurouze.

 

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La maison de l'éclusier à l'écluse de l'Océan

 

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Arrivée de la Rigole de la Plaine dans le bassin de Naurouze

 

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Le groupe à Naurouze

 

Nous découvrons avec émotion ce vaste terrain plat que Riquet fit araser pour y installer son bassin de réception des eaux. Il le fit en octogone et voulait installer au milieu un monument à Louis XIV, une statue, des chevaux, que le manque d'argent ne permit pas de faire. L'idée était grandiose et ce qu'il en reste a encore beaucoup d'allure. Le bassin est là, bordé d'arbres, traversé par une digue plantée de platanes magnifiques. Comme le bassin ne cesse de s'envaser en son centre, l'eau ne forme plus aujourd'hui qu'un anneau et on a planté de la pelouse au milieu.

 

Pour « boucler la boucle », il nous reste maintenant à rejoindre Castelnaudary, notre point de départ. Nous avons choisi de faire ce trajet en suivant les chemins de crêtes sur les collines situées au sud du canal. Cet itinéraire nous permet de profiter de belles échappées sur les Pyrénées enneigées au sud et puis de traverser des villages peu connus mais qui conservent leur charme d'autrefois avec des moulins à vent, des petites églises, des vestiges de remparts et de châteaux...

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Payra-sur-l'Hers sur fond de Pyrénées

 

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Laurac sur fond de Montagne Noire

 

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Fanjeaux

 

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Le moulin à vent de Villasavary

 

Ce voyage nous laisse pleins d'admiration pour le Grand Riquet, celui que l'on surnommait « le Moïse du Languedoc » car, à l'instar du héros biblique, il avait fait jaillir de l'eau pour approvisionner son canal là où il n'y avait que des étendues desséchées.
 

Fiche technique :
Cartes IGN 2244O, 2245O, 2245E

 

1er jour
Accès à Castelnaudary en train par Toulouse.
Hôtel de France à Castelnaudary : 04 68 23 10 18

 

2ème jour
De Castelnaudary à Verdun-en-Lauragais : 21 km
Taxi de Verdun-en-Lauragais à Saint-Ferréol.
Relais des Quatre Vents à Saint-Ferréol : 05 34 66 00 99

 

3ème jour
Tour du lac : 6 km, puis boucle passant par Sorrèze : 11 km
Relais des Quatre Vents à Saint-Ferréol.

 

4ème jour
De Saint-Ferréol à Saint-Félix-Lauragais : 20 km
Auberge du Poids Public à Saint-Félix : 05 62 18 85 00

 

5ème jour
De Saint-Félix à Saint-Laurent : 16 km
Camping du domaine Saint-Laurent (mobile-home) : 04 68 60 15 80

 

6ème jour
De Saint-Laurent à Villeneuve-la-Comptal : 25 km
Taxi de Villeneuve-la-Comptal à Castelnaudary.
Hôtel de France à Castelnaudary.

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