Chaque année, au week-end de mi-juin, le Club Vosgien de
Saint-Amarin organise une randonnée hors-norme, le Tour de la vallée de la
Thur. Pour cette 38ème édition de 2013, cette grande boucle partait
de Saint-Amarin pour un itinéraire de 96 km et 4000m de dénivelé positif (donc aussi
4000m de dénivelé négatif). C’est probablement la +grande rando non-stop à
allure libre en France… voire au monde !
Il faut évidemment se préparer physiquement et mentalement
pour marcher du samedi après-midi au dimanche après-midi. Nous étions trois
pour participer à ce grand tour : Iliette, Heinrick et moi-même.
Pour notre préparation physique, j’avais programmé 2 randos
hivernales : la première de 45
km en janvier et la seconde de 60 km en février ; nous
n’avions pas réussi à terminer les 60 km... A partir de là, chacun savait quels
étaient ses capacités et ce qu’il devait faire pour se préparer au mieux. Il est important de se préparer en hiver car, dans les
Vosges, les conditions peuvent être très difficiles même à la mi-juin.
Même si on n’avait pas terminé les 60 km, j’étais malgré tout
assez confiant : on était très motivés, on était capable de marcher au
même rythme et, grâce à Iliette qui avait mis un cierge lors d’une rando CAF à
Vézelay, on bénéficiait d’une protection divine ;-)
Nous nous retrouvons donc vendredi soir 14 juin à la gare de
Lyon pour aller à Mulhouse où nous dormons à l’AJ. Et samedi matin, nous
prenons le tram-train jusqu’à Thann puis un TER pour aller à Saint-Amarin. En
discutant avec le contrôleur, celui-ci nous apprend qu’on est en période de
grève et que le TER de 15h29 que j’avais prévu de prendre pour notre retour demain
ne circulera pas !
Il faudra donc prendre celui de 14h29 ou celui de 16h29. L’inconvénient
de ce dernier étant que,s’il a
du retard, on loupera notre TGV de retour sur Paris.
Ayant bouclé le tour en 26 heures l’année dernière, il nous
faut partir vers midi – soit bien avant 14h30, l’heure officielle de départ - pour
avoir le temps de terminer le Tour et prendre le train de 14h29. Heureusement, l’organisation du
CVSA (Club Vosgien de Saint-Amarin) est parfaite et nous pouvons démarrer à
12h15 après avoir récupéré la feuille de route et nos petits bracelets de
participants.
0km – 12h15 Saint-Amarin
Petite photo de groupe avant d’attaquer la montée vers le
col des Dreimarkstein.
Iliette marche un peu moins vite que le rythme que
j’avais prévu ; je me mets derrière elle pour qu’on suive son rythme.
Notre rythme de marche est régulier et, 4h après, on arrive au 1er
ravitaillement à Thann.
19km – 16h30 Thann
D’autres participants arrivent à Thann en même temps que
nous. Ce sont des trailers pour la plupart. On mange un peu (gâteaux, cakes,
quartiers d’orange, fruis secs, carrés de chocolat…) ; les organisateurs
n’acceptent pas de remplir toutes nos gourdes, on va donc faire le plein d’eau
dans un bâtiment à côté. On s’allonge un peu dans l’herbe, repos et massage des
pieds avant de repartir à 17h15.
Maintenant, c’est pratiquement que de la montée jusqu’au
Grand Ballon. Iliette connaît bien cette portion « Thann – Grand
Ballon » qui était l’une des étapes de la Traversée des Vosges faite en
mai de cette année avec Patrick Koon. En cours de montée, on se fait rattraper
par un gars très curieux de comprendre pourquoi on était devant lui avec un
rythme de marche aussi lent. On papote assez longtemps puis il nous laisse
quand notre rythme est vraiment trop lent pour lui.
33km – 20h45 Grand Ballon
La montée finale a été longue et on apprécie la pause d’une
demi-heure au Grand Ballon.
C’est ici qu’est prévu le dîner mais j’ai choisi de ne pas perdre
de temps au restaurant et de nous ravitailler avec les 3 ravitaillements mis en
place par le CVSA (à Thann, Rothenbach, et Rouge Gazon).
Iliette a un début d’ampoule. Elle met un genre
d’elastoplast et je lui propose d’ajouter une chevillère pour éviter au maximum
les frottements. Heinrick pointe nos noms au Grand Ballon pour que les
organisateurs puissent suivre au mieux la progression des participants. Nous
retrouvons notre randonneur bavard qui repart avec nous.
Il nous quitte peu après, à la Ferme du Haag, car il a
l’habitude de faire toute la crête par la route, un itinéraire +court et
+facile que de suivre les sentiers du Tour de la Thur.
Peu de temps après, un autre participant se joint à notre
groupe car il n’a pas envie de marcher seul alors que la nuit commence à
tomber. C’est un des conseils importants dit et répété par les
organisateurs : il ne faut pas marcher seul et encore moins la nuit où le
balisage est très peu visible (il n’y a pas de balisage spécifique mis en place
pour le Tour de la Thur) car on a vite fait de prendre un mauvais chemin. Bien
normalement, il nous quitte dès qu’un groupe +rapide nous double.
Au Markstein, il fait vraiment nuit (couverture nuageuse et
moins d’un quartier de lune). Plusieurs participants préfèrent suivre la route.
Avec ma trace GPS, on n’a pas de souci pour continuer sur les chemins et je me
retrouve « capitaine de route » pour quelques autres participants.
Sur cette partie des crêtes, Heinrick avance +vite que nous
et il doit nous attendre de temps en temps. Le vent souffle bien, les
coupe-vents sont indispensables. Cette partie en crête est longue et assez
monotone ; nous avons hâte d’arriver au second ravitaillement de
Rothenbach.
53km – 1h45 CPIE Rothenbach
Le ravitaillement est dans une grande salle genre refuge. Il
fait bon à l’intérieur. C’est bien mieux que l’année dernière où nous étions
trempés et transis de froid sous des barnums à l’Abri du Becherkopf. Il n’y a
pas grand-monde au moment où nous arrivons. Nous y restons ¾ d’heure, le temps
de bien se réhydrater (eau, boissons au sirop, café, thé), de manger (gâteaux,
cakes, quartiers d’orange, fruits secs, carrés de chocolat…) et de nous masser
les pieds.
Je suis épaté de voir que nous repartons si facilement après
plus de 50 km
alors que notre distance maxi a été d’environ 45 km cette année.
Le sentier est raide par moment. C’est d’ailleurs une des
caractéristiques du Tour de la Thur, il y a des portions de sentiers
techniques. Et il vaut mieux les connaître pour pouvoir les éviter lorsque la
météo est très mauvaise.
Nous arrivons à 3h30 au col du Bramont. Après, il y a 7 km à faire sur une petite
route jusqu’à la Ferme-auberge du Grand Ventron où on peut prendre le
petit-déjeuner. Cette partie se fait sur route car le grand nombre de
participants abîmerait la réserve naturelle de la forêt du Grand Ventron et la
tourbière de Pourri-Faing. On compatit en doublant un participant qui soufre
d’ampoules.
Comme pour le dîner, j’ai décidé de faire l’impasse sur le
petit-déjeuner mais ça se révèlera une erreur : avec sa grande
constitution, Heinrick avait besoin d’un repas à ce moment-là.
On fait une pause de 20’ et on repart vers 5h30.
Vers le Haut de Felsach, Iliette dit qu’elle est
fatiguée ; avec 68 km
dans les pattes et la nuit blanche qu’on vient de faire, nous le sommes tous
alors on s’arrête pour s’allonger et se reposer ¾ d’heure. L’année dernière, je
n’avais pas fait ce genre de pause au moment où j’étais fatigué et je l’avais
payé cash un peu +tard en étant obligé de m’arrêter pour dormir alors que
j’étais épuisé.
En repartant, Heinrick nous annonce qu’il s’arrêtera au col
d’Oderen. Il va bien physiquement mais il sent qu’il risque la fringale car il
n’arrive plus à manger ses barres céréales tellement son estomac est barbouillé
par tous les grignotages divers. Il lui aurait fallu un vrai repas. L’année
prochaine, il fera le Tour de la vallée en s’inscrivant au dîner.
70km - 8h col d’Oderen
Heinrick va être emmené en voiture à Saint-Amarin (les organisateurs
ont mis en place des navettes à plusieurs endroits du parcours pour rapatrier
les participants qui abandonnent).
Nous continuons donc à 2, Iliette et moi. A part une partie
raide peu après le col d’Oderen, l’itinéraire monte tranquillement jusqu’à la
ferme du Drumont. Ensuite, c’est la descente la +raide de tous le parcours pour
arriver au col de Bussang. Iliette qui jusqu’à présent était à l’aise dans les
descentes commence à avoir du mal à descendre.
76km – 9h45 col de Bussang
Après ce col, c’est la dernière longue montée,
sur 3 km.
On sent que la fatigue est générale, on nous double +lentement. En passant
devant le kiosque de Sotré, où je m’étais arrêté pour dormir l’année dernière,
je suis heureux d’être si peu fatigué. Peu après, quelques participants
hésitent sur le chemin à suivre et certains sont partis sur le mauvais chemin.
La trace GPS nous évite ces pertes de temps.
83km – 12h Rouge Gazon
Quel bonheur d’arriver au 3ème
ravitaillement ! Il ne nous reste que 13km à faire !
En plus de la nourriture habituelle des précédents
ravitaillements, il y a un excellent bouillon de légumes. Il ne faut pas trop
traîner et on repart une demi-heure après. On sait déjà qu’on arrivera trop
tard pour prendre le train de 14h29 mais il faut qu’on arrive avant 16h30 à
Saint-Amarin pour ne pas louper notre train de retour sur Paris qui part de
Mulhouse à 17h40.
Cette dernière partie de crête nous semble
interminable ; elle fait environ 6 km mais le schéma de la feuille de route
qu’on nous a donné au départ donne l’impression que la partie de crête est
courte et qu’on va attaquer très vite la descente vers Saint-Amarin. Je
consulte régulièrement ma montre et j’aiguillonne Iliette pour qu’on garde un
bon rythme. Malgré sa fatigue, elle reste zen ; elle a un mental très
fort.
89km – 14h20 col de Rimbach
Ouf ! On va enfin commencer la descente vers
Saint-Amarin et on est dans le bon timing pour arriver vers 16h. Au col des
Dreimarkstein, on retrouve le sentier qu’on avait pris hier et nous arrivons à
Saint-Amarin à 16h. Heinrick est déjà à Mulhouse où i a testé les restaus et on le retrouvera tout à
l’heure dans notre TGV de retour sur Paris.
96km – 16h Saint-Amarin
Pendant qu’Iliette va acheter les billets de train, je vais
enregistrer notre arrivée et j’ai le plaisir d’être accueilli par un
« Tiens ! V’la mes parsiens ! » par une des organisatrices
bénévoles. Le Tour de la vallée de la Thur, c’est non seulement une randonnée
extraordinaire mais aussi une ambiance familiale où tout le monde discute avec
tout le monde et où l’entraide n’est pas un vain mot :-)
Epilogue
En sortant du train gare de Lyon, je me rends compte que
c’est moi qui, de nous 3, a
le plus de courbatures ! Tant mieux, le +important pour moi était qu’aucun
de nous ne se blesse pendant cette aventure.
Voilà, j’ai fait ce récit détaillé pour montrer que ce Tour
de la vallée de la Thur est accessible à beaucoup d’entre nous ; il suffit
d’être habitué aux longues randonnées et capable de marcher une dizaine
d’heures d’affilée en montagne, même sous la pluie et dans le froid.
Les statistiques de l’édition 2013 sont disponibles sur le
site du CVSA :
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463 participants, dont 1/3 de femmes ;
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277 à l’arrivée soit 60% de finisseurs.
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Le plus âgé des finisseurs à 78 ans !